3 novembre 2010
Les autorités locales entendent revoir l'entretien du tissu urbain
Constantine veut se refaire une beauté architecturale
De notre correspondant à Constantine
Nasser Hannachi
Constantine a entrepris la réhabilitation de ses anciens immeubles en 2000. Depuis, les opérations de restauration pour relooker la cité millénaire en dégradation avancée évoluent de manière chaotique. Les travaux entrepris sur les façades ont été pratiquement achevés sans contrainte. Cependant, il reste à intervenir là où les dommages sont apparents et nécessitent une intervention. Il s'agissait d'opérer à l'intérieur des constructions pour conforter leurs structures fragiles. L'Office de promotion et de la gestion immobilière (OPGI) et la Direction de wilaya du logement et des établissements publics (DLEP), principaux intervenants, en compagnie des entreprises, sont désormais dans l'attente d'une nouvelle stratégie, mais surtout d'une enveloppe financière en vue de poursuivre les chantiers engagés et d'en lancer d'autres. Considérant cette volonté des deux acteurs, peut-on dire que la réhabilitation du vieux bâti connaîtra un nouvel essor à Constantine ? C'est ce qui ressort des déclarations de différents responsables qui attestent que la restauration du vieux bâti est momentanément «gelée» en attendant la mise en place de nouvelles formules par les pouvoirs publics notamment en ce qui concerne le mode de financement. Assurées jusqu'ici en partie par les taxes sur habitation, les opérations de restauration vont ainsi devoir se soumettre à d'autres critères se rapportant à une identification par immeuble. Ce travail, confirme un responsable de la wilaya, est en cours et est mené par le Centre technique de contrôle (CTC) qui, par cette mesure, devrait intervenir en examinant tout le parc concerné par la réfection. L'étude globale devrait apporter des solutions, voire proposer de nouveaux procédés d'autant que la nature des fonds serait à revoir, car dépendant de la trésorerie publique conformément à la volonté du gouvernement qui a décidé de soutenir les quatre grandes wilayas du pays en la matière, dont Constantine. Il va sans dire que la taxe d'habitation ne peut couvrir toutes les dépenses induites par les chantiers de réhabilitation, d'où cette décision de revoir le procédé et de songer à un éventuel financement en faveur des organismes publics (DLEP et OPGI) et privés qui prendront en charge les travaux de restauration. «Jusque-là, les travaux se sont rapportés à des rafistolages de façade. Le montant de ces premières opérations est de l'ordre de plus
de 140 millions de dinars, qui ont permis de réhabiliter 41 immeubles situés à Didouche Mourad et Larbi Ben M'hidi. A ces travaux
s'ajoutent des opérations de ravalement de façade moyennant un montant de 80 millions de dinars. Mais le plus dur reste à faire. Il s'agit d'intervenir à l'intérieur des immeubles et appartements. Et cela nécessite un confortement de fond. C'est-à-dire les parties communes du bâti», explique un cadre local. Sur un autre chapitre, l'OPGI a engagé en 2000 les toutes premières opérations de réhabilitation du vieux bâti pour un montant de 300 millions de dinars, dans le contexte de l'entretien des nouvelles cités et des constructions coloniales.
Manque de professionnalisme et incivisme, un frein
De tout temps -ou presque- les pouvoirs publics ont dénoncé le manque de professionnalisme ayant caractérisé les opérations de réhabilitation engagées pour relooker et restaurer le vieux bâti de Constantine en état de délabrement. Les premières livraisons avant 2010 ont accusé un retard flagrant, avec plus de 20 mois de délai de réalisation. Les responsables expliquent cette longueur de délai par le fait qu'il existait des locataires qui n'étaient pas sur place pour faciliter la tâche aux entrepreneurs, lesquels n'ont donc pu terminer leurs travaux. Toutefois, cette explication est souvent rejetée par l'OPGI qui a multiplié les mises en demeure en vue d'inciter, voire de mettre en garde les détenteurs de projets, à accélérer la cadence. Les premiers travaux ont concerné des immeubles situés à l'avenue Aouati Mostefa, le Coudiat, l'avenue Abane Ramdane, Larbi Ben M'hidi, 19-Juin 1965. Les budgets étaient prêts mais les travaux ont avancé à pas de tortue rendant impossible la réception des chantiers aux dates fixées. Pour l'heure, ce dossier n'est pas définitivement clos. En témoignent les chantiers qui restent en cours. En se lançant dans ces ouvres de réhabilitation relatives au vieux bâti, l'OPGI songeait à faire d'une pierre deux coups : récupérer les esquisses et renflouer ses caisses par les créances restées en suspens dès lors que le financement est assuré en partie par la taxe d'habitation. Les 58 immeubles retenus en 2008 nécessitent deux types de travaux, selon l'OPGI. Il s'agit des ravalements de façade et des réhabilitations des parties communes. Ainsi, 40 bâtisses parmi les 43 concernées par la première tâche ont été conviées à des entreprises privées pour ravaler les façades.
Les trois restantes viennent d'être lancées via des appels d'offres après des échecs en 2006. Ils nécessitent une bagatelle de 60 millions de dinars. Cependant, il faut signaler que, parmi ce lot d'immeubles dit «bâti colonial» il y a une partie qui a été livrée, mais les travaux se poursuivent dans d'autres secteurs. La réhabilitation touche également au confortement des structures, explique la même source et d'ajouter : «Il est nécessaire de conforter des murs à l'intérieur des appartements. C'est ce qu'on appelle des réhabilitations lourdes.» En ce qui concerne les restaurations des parties communes des immeubles engagées à la cité Terrasses à titre d'exemple, 15 immeubles sont inscrits dont 12 attribués à des opérateurs privés et 3 en phase d'étude pour lancement.
La problématique du manque de qualification chez certaines entreprises privées ou publiques dans l'accomplissement de ce genre de travaux aura pénalisé les chantiers de restauration du vieux bâti qui n'ont pu être bouclés à temps. L'OPGI a dû contraindre les toutes premières entreprises à revoir leurs échéances sans quoi l'office serait dans l'obligation de résilier le contrat. Le directeur de l'office ne mâchera pas ses mots en attestant que les différentes réhabilitations ont buté sur cette réalité : l'inexistence de sociétés spécialisées. Et c'est le cas pour diverses structures anciennes datant de l'époque colonial. Mais la situation commence à être maîtrisée, faut-il le souligner, après des années de bricolage. Pour sa part, le nouveau wali de Constantine questionné dernièrement sur ce lourd héritage
de réhabilitation du vieux bâti, n'a pas caché son intérêt à le préserver et le sauvegarder. «La réhabilitation ne devrait en aucun cas être sacrifiée par d'autres opérations de relogement ou même de réalisation de nouveaux immeubles», a-t-il expliqué en signifiant son intention d'accorder un intérêt particulier à ce volet, car il tient à redonner à Constantine une belle apparence sans occulter son passé historique et patrimonial. En somme, la wilaya s'est lancée dans une course folle pour restaurer en évitant les rafistolages, et ce, depuis que les pouvoirs publics ont mis le paquet. L'image de la cité est avenante par endroits et n'a pas encore sacrifié son esthétique. Il s'agit de généraliser cet entretien. Le nouveau mode de fonctionnement du budget alloué devrait redonner un autre élan à la
restauration. A en croire le chef de l'exécutif qui a désormais annoncé la couleur, Constantine devra retrouver son visage d'antan et ses repères patrimoniaux et architecturaux via la réhabilitation.
N. H.
Retour à
la revue de presse