31 décembre 2016
Plan d'urgence pour la vieille ville de Constantine
Un électrochoc
pour une situation désespérée
L'intervention s'apparente à un électrochoc
sur un corps admis aux urgences.
Moins de trois mois après son installation à la tête de
la wilaya, le nouveau chef de l'exécutif, Kamel Abbes, vient de mesurer
l'ampleur du désastre commis à la vieille ville de Constantine.
Après des mois d'attentisme et de tergiversations de son prédécesseur,
le nouveau wali vient de prendre les choses en main, en ouvrant l'épineux
dossier de la réhabilitation des sites historiques de la médina.
Un dossier qui n'a cessé d'alimenter la polémique depuis son
lancement. Il s'agit d'une vingtaine d'opérations, soit 79 projets,
touchant des mosquées, des zaouïas, des maisons, des hammams et
des ruelles pour un montant de près de 8 milliards de dinars. Un vaste
chantier entamé il y a près de trois ans à la faveur de
la manifestation «Constantine, capitale de la culture arabe 2015».
Une entreprise qui prendra les allures d'un cauchemar pour la vieille ville
et ses habitants.
Lors d'une réunion convoquée en urgence en fin de semaine dernière
par le wali de Constantine, en présence de tous les secteurs concernés,
et à laquelle la presse n'a pas été conviée à assister,
une véritable autopsie de la situation a été opérée,
avant que les principales mesures ne soient dégagées. Selon un
communiqué des services de la wilaya, «le directeur de la culture
a été chargé par le wali d'établir un plan d'urgence
au profit du périmètre sauvegardé de la ville».
Il s'agit, lit-on dans le même document, de faire un inventaire détaillé de
toutes les opérations, au cas par cas, avec examen de l'avancement des
travaux sur chaque site, et de dresser un ordre de priorités pour achever
les chantiers ouverts et dégager tout le matériel sur les ouvrages
non encore entamés.
En parallèle, un recensement de toutes les bâtisses menaçant
ruine sera dressé comme première urgence. On a appris également
que le wali a donné des instructions au président de l'APC de
Constantine pour évacuer tous ces immeubles et fermer l'accès à toutes
les artères abritant les travaux. Selon les mêmes services, toutes
les opérations de réhabilitation des maisons menacées
seront relancées à la charge des propriétaires, alors
que l'Etat se chargera uniquement des propriétés communes. Le
tout sera supervisé par le bureau d'études ayant mis en place
le plan de sauvegarde de la vieille ville. La commission de wilaya chargée
du suivi des projets avec l'Ogebc a été appelée à effectuer
des visites sur les sites concernés.
Une dégradation irréversible
En dehors de l'état des lieux dressé pour des opérations à l'arrêt
depuis deux ans, le communiqué de la wilaya se contente de mesures générales,
sans aller au fond du problème, en évitant de se prononcer sur
le sort de ces vestiges centenaires qui sont sérieusement menacés, à l'exemple
de la mosquée Sidi Afane, vieille de onze siècles, la mosquée
Kettani, à Souk El Asser, laissée dans un état déplorable,
et surtout l'inclassable Djamaâ Lakhdar, actuellement méconnaissable.
On n'oubliera pas de citer les cas de la zaouïa Rahmania, complètement
défigurée, ni la zaouïa Tabia, ayant subi un bradage qu'elle
ne méritait pas, ni la célèbre mosquée du quartier
mythique Arbaine Chérif, dont l'état fait toujours pleurer ses
fidèles. Même le très connu café Nedjma, le plus
ancien de la ville de Constantine, n'a pas échappé à ce
massacre, bien que sa fermeture soit intervenue six mois après l'arrêt
de tous les chantiers faute de financement.
Cette fermeture, qui dure depuis plus d'une année, a été une énorme
erreur pour ce pan du patrimoine culturel de Constantine. Si la plupart des
Constantinois demeurent encore sceptiques quant à la finalisation effective
des ces opérations, les plus optimistes s'interrogent encore sur la
finalité de ce plan d'urgence. Apportera-t-il vraiment les solutions à une
situation chaotique qui a fait sombrer dans le coma une grande partie du patrimoine
centenaire d'une ville qui ne méritait pas vraiment tout ce bradage
systématique et organisé ?
Arslan Selmane
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