L'Université Populaire

 

L'Université Populaire de Constantine, construite en 1906 en face de la mairie, laissera sa place en 1918 au Palais de Justice.
Reconstruite derrière la poste et inaugurée en 1932, l'UP était un établissement municipal, à la disposition des associations culturelles.

• • •

• • •

C'est à l'Université Populaire que plusieurs concerts de Cheikh Raymond ont été enregistrés.

Extrait d'un entretien avec Jacques Leyris, fils de Raymond Leyris, datant de 1995.

- D'où vient l'enregistrement du concert de 1954 à l'Université Populaire de Constantine que vous publiez aujourd'hui ?
- Cet enregistrement est dû à un inconditionnel de mon père et de sa musique. Cette personne, qui possédait un magnétophone -- fait assez rare pour l'époque -- , avait disposé des micros à l'intérieur de bouquets de fleurs et enregistré le concert sans que l'on n'en sache rien. A l'origine, les bandes n'avaient pour but que de servir le bonheur de ce mélomane. Elles l'ont suivi en France en 1962. Un an après sa disparition en 1969, sa femme me contacte en me disant qu'elle possède un certain nombre d'enregistrements originaux ( pirates ) de mon père et me propose de les acheter. Ce que j'ai fait. Grâce à ce piratage d'un jour, on peut aujourd'hui se rendre compte de ce que pouvait être un concert de malouf à Constantine en 1954. Et avec le fond d'archives dont je dispose, j'ai de quoi faire une vingtaine de CD.

• • •

Quelques souvenirs de Constantinois :

« C'etait derrière la grande poste, en allant vers le cinema Nunez je crois ou vers l'avenue Viviani ou vers le pont sidi Rached.
A l'école primaire, nous allions voir des films en noir et blanc.  Plus tard, nous avons decouvert la grande salle de théâtre où se donnaient des concerts.  En 62/63 j'ai assité à un radio-crochet. »

« L'UP se touve juste en face de notre appartement au 10 de  l'avenue Viviani.
Si ma mémoire est bonne j'ai fais aussi pendant un certain temps du théatre avec une équipe d'intectuels, je crois bien que nous avons monté une piéce de Brecht : "celui qui dit oui , celui qui dit non" mais mon créneau c'était plutôt la comédie de boulevard. »

« Il y avait un conservatoire de musique, ainsi qu'une grande salle de spectacle, où se donnaient des concerts, des conférences et des spectacles. Pour ma part j'y ai assisté à des concerts de malouf, sous forme de conférences, dirigés par feu le docteur Bendali. 
Il existe actuellement beaucoup de CD de Raymond, qui ont été enregistrés Live, à l'UP. 
J'y ai aussi suivi, début des années 60 des cours de solfège sous la direction d'une vénérable dame qui s'appelait Madame Sikard. Elle était d'une extrême gentillesse. Nous étions tout petits et elle était déjà d'un âge avancé. Elle tenait, au début de chaque cours, qu'on lui fasse la bise, sur la joue. Ce que nous faisions avec respect et plaisir, malgré la couche de fard qui nous restait chaque fois sur les lèvres. 
J'y ai aussi suivi des cours de flûte sous la direction de musiciens venus spécialement de Paris. Ils nous ont fait répéter pendant 6 mois, et nous avons finalement donné un spectacle à l'UP. Il y avait un de ces parisiens au piano. Nous, nous avions une chorale mixte, et beaucoup de flûtes. Entre autre morceau, nous avions interpreté l'Hymne à la joie de Beethoven. 
Enfin, il y avait aussi, si mes souvenirs sont bons, des cours de dessins et de peinture. »

« L’U.P n'abritait pas que les conférences ou des écoles de Musique.
 Certes pour la Musique il y avait Mr Daoudi qui donnait des cours de violoncelle, Si Abderrahmane BENCHARIF et BENKHOUIET étaient au violon au Piano il y’avait Bibi...
Des galas et des concerts y étaient donnés aussi sans oublier des représentations théâtrales de troupes d’amateurs comme "El Amal El Masrahi" dirigée par Si El Hacène BENCHEIKH LEFGOUN et dont certains membres sont actuellement de grands acteurs (3ami Bachir, Hacène BENZERARI, Rachid le Comédien.......) et la liste est longue.
De grands chanteurs également s’y sont produits, Raymond LEYRIS, Z’hor et Med Tahar FERGANI y ont donné des soirées magnifiques.
L’UP a été le grand  pôle de  la culture à Constantine. »

« Je confirme que l'UP était municipal , on y donnait des galas de danse aussi quand le théâtre n'était pas disponible
J'ai eu aussi la même prof de solfège avec qui j'ai le souvenir cauchemardesque de ses dictées musicales
La scène était plus petite que celle du théâtre »

« Effectivement il y avait ces dictées . Mais elle était très  gentille. Je me rappelle que c,était dans une salle du sous sol à l'arriéré  de l'UP. Il me semble qu'on surplombait la caserne  des pompiers. »

« Dans les années 58/59 et jusqu'en 62 ma fille a suivi des cours de danse à l'UP. Je ne me souviens plus du nom de son professeur. Il y avait aussi Odile Pontillo. Enrico Macias, Gaston Guenassia à l'époque prêtait quelques fois son concours lors des répétions et des galas. Elle a aussi suivi des cours de musique avec Mme Sicard, à son domicile. A l'époque nous habitions Rue Rivière et Mme Sicard El Kantara, ce qui simplifiait les déplacements. Cette dame donnait aussi des leçons de musique au Plètre. »

« Il me semble que dans la salle de spectacle principale il y avait un tout petit balcon, non ? »

« J'ai gardé un vague souvenir de ce balcon, comme une image brumeuse, surtout quand nous avions donné un spectacle avec nos amis parisiens en 1964. »

« L'UP. Quels beaux souvenirs.Nos profs nous y ramenaient dans les années 60 pour assister à des conférences. C'est à cette période ,je me le souviens comme si c'était maintenant ,que j'ai connu (le conférencier était français) le poète et dramaturge espagnol Federico Garcia Lorca...
L'UP possède un grand balcon, pour nous enfants c'était notre "perchoir", notre "poulailler"! Ah mon Dieu,que turbulents nous étions,c'était l'occasion d'or pour narguer et nous moquer de nos maîtres d'internat! On riait, dansait, chantait à tue-tête.
O Temps,veux-tu me porter à cette époque! »

• • •

Quelques photos de l'UP qui abrite aujourd'hui l'Institut Régional de Musique.


Entrée principale. Derrière, au fond, la Poste.


Façade est, vue en venant du pont Sidi Rached


Façade sud


Façade arrière, vue de la place des Chameaux

Photos Abdellah Deffous